hypothèse d’un Internet en développement cybernétique dans le quotidien de nos vies sociales à peu été traitée par la sociologie jusqu’à présent.
En effet, sociologie des usages et sociologie des réseaux ont largement dominé l’étude de ce champ durant les années 2000, succédant à l’intense débat technophiles/technophobes des années 1990 en France. Seuls les sociologues Philippe Breton en 1994 et Céline Lafontaine en 2006 ont attiré l’attention sur un Internet annonçant pour eux la concrétisation de l’utopie cybernétique de la communication.
Un point de vue critique donc mais peu étayé empiriquement. Mais à mesure qu’advenaient les années 2010 certains chercheurs ou observateurs manifestaient leurs inquiétudes quant au développement cybernétique de l’Internet sous l’égide du développement stratégique des « géants du web » comme Google, Yahoo, Facebook ou encore des mega-entreprises rescapées de l’industrie logicielle comme Apple et Microsoft : quelques entreprise mondiales s’appuyant sur le web pour capturer et analyser les comportements de centaines de millions de personnes dans le monde, via un appareillage sophistiqué d’outils de traitement de données et surtout l’effet centripéte de leurs multiples services web agissant comme collecteurs pour leurs gigantesques centres d’exploitation de données dont ils sont propriétaires.
Sur cette thématique on citera ZITTRAIN Jonathan, VAIDHYANATHAN Siva, LOVINK Geert pour le monde anglo-saxon, ou en France la lecture qu’en font les chercheurs en sciences de l’information et de la communication Olivier ERTZSCHEID, Louize MERZEAU, Philippe DUMAS ou la juriste Belge Antoinette ROUVROY.
Le phénomène technique, architectural de ces systèmes de collectes et traitement instantanée des données de comportements des individus, s’accompagne en parallèle des pratiques elles-même des internautes qui semble délibérément alimenter ces systèmes cybernétiques : blogs, réseaux sociaux, emails entretiennent le « grand catopticon », effigie moderne du panopticon selon JB GANASCIA chercheur en Sciences informatiques à Paris.
Et donc, seule présence notable des sociologues français sur cette problématique de l’Internet cybernétique des géants du web : le sociologue d’Orange R&D Emmanuel KESSOUS qui écrivit un très bon – et unique – article dès 2006 …
Pourtant il semble que les éléments empiriques d’un déploiement de ces logiques cybernétiques sous l’égide de quelques géants du web se manifestent de mieux en mieux à mesure que nous avançons dans les années 2010…
Ce sont justement ces manifestations empiriques qui doivent faire l’objet d’une description soutenue pour qu’enfin les sociologues prennent conscience .
Originally posted 2020-10-01 16:17:43.